La prise d’acte de la rupture du contrat de travail par l’avocat

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L’avocat du salarié peut-il prendre acte de la rupture du contrat de travail sans que l’employeur soit contraint de vérifier qu’il justifiait d’un mandat spécial pour le compte de son client ?

Dans un arrêt rendu le 22 novembre 2017 (n° 16-12.524), la chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que le salarié peut être valablement engagé par son avocat sur le fondement d’un mandat apparent lorsqu’il prend acte de la rupture de son contrat de travail pour le compte de son client.

Dès lors, l’employeur est autorisé à ne pas vérifier si l’avocat justifie d’un mandat spécial pour prendre acte de la rupture de son contrat de travail pour le compte de son client, à certaines conditions.

En effet, l’employeur peut se contenter de se fonder sur le mandat apparent à partir du moment où l’avocat, auteur de la lettre de prise d’acte, se présente comme étant celui du salarié et s’exprime au nom de ce dernier.

Il faut également que le contenu de la lettre de prise d’acte démontre que son auteur a une connaissance approfondie de la situation du salarié. En l’occurrence, l’avocat était au courant des déplacements du salarié, de l’accident du travail récent dont il avait été victime ainsi que des données du litige l’opposant à l’employeur.

Partant, le mandat de l’avocat sera d’autant plus apparent qu’il disposera d’une connaissance pointue non seulement des conditions de travail du salarié mais également des raisons précises pour lesquelles le salarié a décidé de mettre un terme unilatéralement à son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Si la solution s’avère séduisante d’un point de vue pratique, en ce sens que l’avocat peut directement mettre fin au contrat de travail, abstraction faite de l’ouverture d’une procédure judiciaire dont il a vocation à intervenir, elle n’en reste pas moins critiquable au regard de l’autonomie de la volonté du salarié dans la rupture unilatérale de la relation de travail.

C’est qu’en effet, si l’on confronte la prise d’acte de la rupture du contrat de travail à la démission, dont la jurisprudence lui voue les mêmes effets en cas de décision infondée, alors il est difficile de comprendre que la volonté claire et non équivoque du salarié de mettre un terme à son contrat de travail en cas de démission puisse être substituée à un courrier d’avocat lors d’une prise d’acte.

Toujours est-il que cette position, dont il faut bien reconnaître qu’elle garantit au salarié de se prévaloir du courrier de son avocat dans la défense de ses intérêts, notamment en cas d’action prud’homale, se justifie largement par le fait que la prise d’acte, de création jurisprudentielle, n’est soumise à aucun formalisme textuel.   
Jérémy DUCLOS

Avocat

Spécialiste en droit du travail
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