Formalisme de la convocation à l’entretien préalable de licenciement

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L’employeur doit-il indiquer dans la convocation à l’entretien préalable de licenciement les motifs de la mesure qu’il se réserve de prononcer ?

Dans un arrêt rendu le 08 mars 2017 (n° 14-20.365), la chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que l’employeur satisfait à l’exigence de loyauté et du respect des droits du salarié dès lors qu’il indique dans la lettre de convocation adressée au salarié l’objet de l’entretien préalable, au cours duquel le salarié a la faculté d’être assisté pour se défendre contre les griefs formulés par son employeur.

La Cour de cassation vient donc rappeler une énième fois que l’employeur n’a pas l’obligation d’indiquer dans la lettre de convocation à l’entretien préalable de licenciement les griefs reprochés au salarié.

Les juges du fond n’ont pas à condamner l’employeur à verser des dommages-intérêts au salarié pour non-respect des droits de la défense dès lors que celui-ci a pu faire valoir ses moyens de défense au cours de l’entretien, peu important le fait que les griefs invoqués par l’employeur n’aient pas été présentés préalablement à cet entretien, au moyen de la lettre de convocation.

En ce sens, cette décision vient conforter, si toutefois était-il nécessaire, l’arrêt du 06 avril 2016 (n° 14-23.198) qui, par un attendu de principe identique, avait indiqué que « l’énonciation de l’objet de l’entretien dans la lettre de convocation adressée au salarié par un employeur qui veut procéder à son licenciement et la tenue d'un entretien préalable au cours duquel le salarié, qui a la faculté d'être assisté, peut se défendre contre les griefs formulés par son employeur, satisfont à l'exigence de loyauté et du respect des droits du salarié » (Cf. mes commentaires de l’arrêt dans une publication précédente).

Cette problématique met en confrontation de manière assez classique les intérêts antagonistes de chacune des parties au contrat de travail.

Du côté du salarié, le raisonnement consiste à soutenir que les droits de la défense ne sont pas respectés à partir du moment où le salarié n’a pas été mis en mesure de prendre connaissance, avant son audition, des faits qui lui sont reprochés, de manière à ce qu’il puisse en débattre contradictoirement avec l’employeur, en connaissance de cause et ne pas être pris au dépourvu.

Même si elle est dénuée de fondement textuel, cette analyse n’en est pas moins judicieuse et pertinente en ce sens que le salarié qui a connaissance des faits qui lui sont reprochés pourra éventuellement rapporter la preuve, au cours de cet entretien, du fait que ce qu’il a prétendu commis ou omis n’est matériellement pas avéré.

Du côté de l’employeur, le raisonnement veut que les textes (articles L. 1232-2 et R. 1232-1 du code du travail) n’imposent à aucun moment que la lettre de convocation à l’entretien préalable mentionne expressément les griefs susceptibles de fonder la mesure de licenciement.

D’ailleurs, si l’employeur venait à inscrire, sans que la Loi ne l’y oblige, dans la lettre de convocation les motivations de sa décision à venir, alors il prendrait le risque que le salarié vienne lui reprocher qu’il a d’ores et déjà pris sa décision, ou à tout le moins encadré les motifs de sa décision, avant l’entretien préalable qui a justement pour but de vérifier, par l’audition du salarié et de son défenseur, le cas échéant, si les griefs reprochés sont fondés, objectifs et vérifiables. 

D’un côté comme de l’autre, les arguments ne manquent pas et permettent d’expliquer à eux-seuls l’engouement qui se forme, notamment par la résistance des juges du fond et l’insistance des avocats de salariés, autour de cette épineuse, perpétuelle et néanmoins passionnante question de l’indication des griefs du licenciement au sein de la lettre de convocation à l’entretien préalable.

Me Jérémy DUCLOS

Avocat à la Cour